Lucie Remer
Porte de Saint-Ouen, les non-inscrits poussés au vote
Dans le 17ème arrondissement de Paris, les militants du parti La République en Marche vont à la rencontre des non-inscrits.
« Bonjour, on fait le tour du quartier pour vérifier que tout le monde est bien inscrit sur les listes électorales. Est-ce que vous pouvez nous ouvrir ? » La phrase est rôdée, le ton, presque suppliant. Il est 15 heures et Amaury Hoymans, référant La République en Marche dans le 17èmearrondissement de Paris, interpelle une habitante à travers les grilles d’une résidence rue Jean Leclaire. À ses côtés, trois militants affichent leurs plus beaux sourires. L’échange se poursuit. La femme fini par accepter.
Depuis janvier, le parti présidentiel mène des actions de porte-à-porte pour encourager les Français non-inscrits à rejoindre les listes électorales. Ils étaient 5 millions en 2017 selon l’INSEE. « On vise en priorité les quartiers abstentionnistes, explique Amaury.Ici, à la présidentielle, la participation n’excédait pas 30%. »
Cet après-midi, ils sont quatre à faire le tour des immeubles porte de Saint-Ouen. Tous ont entre 22 et 29 ans. « Ce sont souvent des jeunes qui font ces opérations, c’est moins traditionnel. »Tracts à la main, ils grimpent les 6 étages. Chacun son binôme « On s’occupe des étages pairs » décide Amaury.
Efficacité
Le travail est simple. Frapper à la porte, se présenter, puis déclamer une phrase. Toujours la même. « On fait le tour du quartier pour vérifier que tout le monde est bien inscrit sur les listes électorales. »Sur le dépliant, une liste d’indications et un flash code menant au site du gouvernement. Les Français ont jusqu’au 4 mars pour vérifier leur inscription. « Généralement, on reçoit un bon accueil,assure Joseph, jeune collaborateur parlementaire.Sur une centaine de portes frappées, 50 sont ouvertes et 20 mènent à une discussion. »
Une femme au turban coloré apparait dans l’entrebâillement de la porte. Les deux militants lui déclament leur phrase. « Vous êtes inscrite ? » Hochement de tête. « Moi oui, mais pas mon mari. » Elle accepte le papier. Le slogan en gros caractères attire l’œil. « N’hésitez pas à en parler à vos proches ! » La porte se referme.
Amaury pianote sur son téléphone. Sur l’écran, l’application Je M’engagedéveloppée par le parti. Depuis une semaine, les militants y recensent leurs actions de porte-à-porte. « On clique sur l’immeuble, on ajoute le nombre d’étages et les portes frappées, explique-t-il. Ça évite de se rendre deux fois au même endroit. » On précise si la personne est présente, inscrite sur les listes et si elle prévoit de voter. Si la porte ne s’ouvre pas, les militants déposent les tracts sur le paillasson.
Automate
Joseph appuie tour à tour sur les boutons de l’interphone. « Il fait beau aujourd’hui, les gens ne sont pas chez eux. » Camélia soupire. Cette animatrice locale du parti n’en n’est pas à son premier porte-à-porte. « Entrer dans un immeuble c’est ce qu’il y a de plus compliqué » confie-t-elle. Mais les militants sont patients. Ils consacrent en moyenne une heure trente à leur opération. La jeune femme rigole. « On ne m’a pas proposé de café aujourd’hui. » Il lui faudra attendre un peu. Une locataire vient de leur ouvrir.
La sonnerie est différente. À moitié engloutie par sa longue robe verte, madame Saïd secoue la tête. Toute sa famille est inscrite sauf elle. « Ça ne m’intéresse pas. Les politiciens me déçoivent tous. » Elle refuse le tract que lui tend Joseph. Il le dépose sur le paillasson. Froncement de sourcils. Le militant le ramasse aussitôt. « Désolé, l’habitude » bafouille-t-il. La porte se referme. Camélia ajoute une case sur l’application.
16h30. Fin de l’opération. Les militants se retrouvent aux pieds des immeubles. 36 portes ont été frappées. Un chiffre honorable. Amaury consulte son téléphone. Une certaine Cécile détient le record national : 327 portes frappées. « Elle triche, c’est pas possible. » Tracts entre les mains, ils se rassemblent pour une photo sur les réseaux. Le credo : « Convaincre les français d’aller voter, un par un. » Cheese.
Lucie Remer, Paris, 25 février 2022